Le voiçi l'article en question :Mercenaire du hockey
QUÉBEC - L’attaquant Mike Brault prend sa retraite du hockey. Même s’il n’a évolué que dans des ligues seniors, possiblement que son nom sonne une cloche à vos oreilles si vous démontrez un tant soit peu d’intérêt pour ce sport.
Brault, 43 ans, fut l’un de ceux qui ont largement contribué à bâtir la réputation de la LNAH, un circuit vendu par sa violence, ses bagarres et incidents disgracieux. Ah oui, quelques bons joueurs sévissaient dans cette ligue qui comptait sur un bassin d’amateurs fidèles, particulièrement dans la première demie des années 2000.
Sa carrière ne pouvait se terminer autrement que par un violent combat. Sauf que cette fois-ci, il se trouvait dans la peau du perdant. Lors d’un match de Donnacona, son équipe, contre Louisville (Ligue senior A de la Mauricie), il a été mis k.-o. et blessé par un plus jeune. La vidéo sur YouTube avait été regardée près de 53 000 fois lors de ma dernière vérification.
Outre une fracture de l’os orbital gauche, il en est résulté une commotion cérébrale. «Je ne me souviens de rien entre le moment où je m’écroule et celui où je retrouve mes sens dans l’ambulance. J’aurais pu être blessé plus sérieusement, je m’en tire bien», explique-t-il en montrant une photo captée avec son cellulaire quelques heures plus tard.
Pas joli du tout. Tout ça pour une poignée de dollars car la ligue, officiellement, ne défraie que les dépenses des joueurs.
Se battre, une passion
Brault a tracé sa voie dans le hockey avec ses poings. Il ne démontrait aucun talent comme joueur et il le confesse. «Mon rôle dans toutes mes équipes consistait à défendre mes coéquipiers. J’étais un goon», dira-t-il presque candidement.
De toute évidence, Brault adorait ce job. Il a bâti sa renommée lors de ses années à Pont-Rouge, de 1996 à 2004, et il a vu à l’entretenir, notamment avec le RadioX et Thetford Mines.
Pour cultiver cette violence sur la glace, il faut aimer ça, la sentir couler dans ses veines. «Je suis le gars qui s’est battu le plus souvent sur la glace dans le monde», précise-t-il en se référant au site dropeyourgloves.com. Effectivement, il occupe le premier rang. «On n’a pas compilé mes batailles dans les parties hors concours et tournois régionaux. Puis en 25 ans à travailler dans les bars, disons qu’il y en a eu plusieurs dans cet univers aussi.»
Brault ne se battait pas pour l’argent. Il parle plutôt de passion. Il y trouvait son défi, sa motivation à s’entraîner, sa parcelle de gloire. «Ça me procurait une notoriété que je ne pouvais pas obtenir en marquant des buts ou en offrant du jeu spectaculaire. Je ressentais une forte poussée d’adrénaline et je voulais toujours me surpasser contre des bagarreurs de plus en plus redoutables. Ça me permettait de voir ma valeur sur le marché.»
Pour lui, le hockey est un spectacle et les bagarres en sont une composante. «Je me battais contre des joueurs comme moi. Je ne donnais pas de coups salauds, je ne frappais pas un adversaire sur la glace. Je contribuais à remplir les arénas et à faire vivre la ligue.»
Collection de commotions
Brault s’est avéré un employé modèle pour la LNAH en se pliant aux règles non écrites du circuit. Il admet que plusieurs combats étaient organisés à l’avance, mais il ne dénigrera pas cette ligue qui lui a procuré beaucoup d’émotions et des revenus supplémentaires.
«C’était la mentalité de la ligue d’agir ainsi. Elle ne se montrait pas sévère envers ses bagarreurs. Je ne me souviens pas d’avoir été suspendu. Des joueurs auraient mérité de plus longues suspensions, mais la LNAH ne sévissait pas trop parce qu’ils remplissaient les amphithéâtres.»
Ce circuit ne reçoit plus de couverture médiatique et les foules ont baissé. Brault sait que ce style de hockey comptait sur des irréductibles et des opposants virulents. Une équipe à Québec raviverait probablement la flamme, pense-t-il.
Doit-on éliminer les bagarres de la LNH? «On n’en voit déjà presque plus.»
Brault pansera ses plaies dans les prochaines semaines. Il calcule qu’il a subi sa 10e commotion cérébrale à son dernier match et combat. On peut croire qu’il ne les compte pas toutes, d’autant plus qu’il a aussi livré des combats de boxe dans l’arène. Rien toutefois pour effrayer Lucian Bute.
Ces commotions pourraient lui causer des problèmes en vieillissant. «Actuellement, je n’ai pas beaucoup de mémoire. Je ne sais pas si ça découle des coups que j’ai encaissés, mais ça n’aide pas sûrement.»
Il se défend d’avoir consommé des produits dopants et autres substances qui augmentent la puissance, la résistance. «Je suis heureux de ne pas avoir créé cette dépendance. Difficile d’arrêter quand on commence ça. Je pèse 210 livres depuis des années.»
Brault ne jouera pas au hockey, cet hiver. Le jeu pourrait lui manquer moins que les bagarres. On lui souhaite de la santé.
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